Sur les ossements des morts, d'Olga Tokarczuk
Bonjour, bonjour mes tout Chers :)
Pour compenser mon billet sur le très évitable L'Agence, je vous présente aujourd'hui le roman qui m'a totalement enthousiasmée juste avant mon départ pour Nice. Je l'ai évoqué plus d'une fois, d'ailleurs, au détour d'un bavardage tant j'en étais satisfaite.
Sur les ossements des morts peut dérouter et surtout décourager les lecteurs les plus sensibles par son simple titre, quelque peu "morbide" : ce serait une grave erreur, croyez-moi, car si ce roman -par son intrigue- s'apparente au genre "polar", il en est un d'une essence très particulière puisqu'il tend aussi bien vers le fantastique (je dirais même l'onirique") mais surtout fait la part belle à la beauté de la nature, aux animaux, à l'astrologie, la poésie,... Beaucoup de douceur et de rêverie autour d'une héroïne d'une sensibilité rare.
Par ailleurs, l'auteure, Olga Tokarczuk est d'origine polonaise et présentée comme la romancière la plus célèbre de sa génération : quatre de ses livres ont été publiés en France dont Les Pérégrins pour lequel elle a reçu le prix Niké, l'équivalent du Goncourt. Aussi, c'est pour nous autres lecteurs, une très belle occasion de découvrir une littérature étrangère ainsi qu'une très belle plume féminine.
Si le titre Sur les ossements des morts vous refroidit, sachez qu'il s'agit ni plus ni moins d'un vers de William Blake -poète et peintre que je chéris- pour qui Janina Doucheyko, notre héroïne, se passionne. Ingénieure à la retraite, cette sexagénaire pleine d'entrain vit dans un hameau au coeur des Sudètes qui n'est occupé qu'à la belle saison. Mais la solitude lui va très bien au teint : elle a ainsi tout le loisir de vivre sa vie comme elle l'entend, d'observer les étoiles, de vivre en communion avec la nature, d'aider son ami à traduire l'oeuvre de Blake,... Lorsqu'elle ne fait pas sa ronde afin de surveiller les résidences secondaires de ses voisins, elle enseigne l'anglais dans une petite école. Janina est une femme des plus appréciables, tranquille, une âme sensible.
Aussi, lorsqu'une série de meurtres frappe son paisible village, elle ne peut rester indifférente, d'autant qu'elle prend conscience d'étranges coïncidences qui lient ces terribles événements : les victimes avaient toutes une passion pour la chasse et des animaux étaient présents à chacun des crimes.
Quitte à passer pour une folle, Janina ne peut garder plus longtemps sa théorie pour elle : les meurtriers sont les animaux, des animaux qui n'en peuvent plus de subir la cruauté des hommes.
Entre deux tranches de vie quotidienne -nous suivons Janina dans ses diverses occupations, partageons ses multiples réflexions en goûtant toujours avec bonheur son humour pétillant ainsi que son infinie bonté- cette enquêtrice d'un genre nouveau tente de regrouper les preuves qui lui permettront de mettre au jour la vérité, une vérité qui dénoncerait la maltraitance que subissent faune et flore laissées aux mains d'hommes malveillants, indifférents aux beautés du monde.
Sur les ossements des morts propose un portrait de femme délicat et original et, surtout, s'impose comme une ode au règne animal, à la nature. J'ai été très sensible aux diverses théories de Janina, tout comme j'ai adoré son mode de vie, une vie solitaire mais riche, poétique, saine, toute simple. Les paysages, les phénomènes naturels, les saisons animent ce roman au rythme doux et dynamique à la fois : un suspense propre aux polars s'installe, nous poussant à faire défiler les chapitres, tandis que le style de l'auteure ainsi que le calme, la sérénité de Janina, nous encourage à savourer chaque seconde de lecture, à goûter chaque mot comme un poème.
Une superbe découverte que je vous encourage à faire.