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She wore blue velvet
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21 janvier 2014

Joyaux, de George Balanchine (1967), en direct du Bolchoï

Bonjour à tous :)

Dimanche après-midi, j'ai eu le grand plaisir d'assister à la retransmission en direct, depuis le théâtre du Bolchoï, du ballet Joyaux, chorégraphié par Balanchine en 1967.

C'est un ballet que je n'avais encore jamais vu, dont je connaissais simplement l'argument et la structure bien singulière. En effet, Joyaux n'est pas un ballet narratif mais un triptyque inspiré des grandes bijouteries de la Cinquième Avenue ainsi que des villes et écoles de danse fondatrices du style de Balanchine.

Chaque partie met donc en scène une pierre précieuse associée à un véritable univers, visuel, stylistique, dansant mais aussi musical car, pour chacune des trois parties, le chorégraphe a fait appel à un grand compositeur. Deux imaginaires conjugués pour nous offrir trois volets enchanteurs, originaux, rendant hommage à trois traditions de la danse.

C'est la partie intitulée Emeraudes qui inaugure cette trilogie sur des extraits de Pelléas et Mélisande et Shylock, de Gabriel Fauré. Considérée par Balanchine comme "une évocation de la France - la France de l'élégance, du confort, des belles robes et du parfum-", Emeraudes se distingue par son raffinement et sa sobre fantaisie. Les costumes, de longs tutus verts, sont dignes de petits êtres sylvains, Elfes, Fées et autres mignons Farfadets. C'est la partie qui m'a paru la plus légère, aérienne ; les danseurs comme en apesanteur ne semblaient plus toucher terre mais voltiger au coeur d'une vaste forêt scintillante.

Un fabuleux moment propice à la rêverie.

emeraudes

Rubis est bien plus passionnée, à l'instar de la pierre incandescente et du Capriccio de Stravinski qui a flatté mon oreille jusqu'à l'émerveillement. 

Ohlalala, mes Chers ! Comme j'ai aimé cette partie qui n'est que cadence et décadence. Les univers visuel et musical incarnent la passion avec une force si puissante qu'elle frôle la violence. Mais il ne s'agit pas d'une violence qui blesse, au contraire, elle chavire, transporte, ensorcelle, comme toute l'oeuvre du compositeur. En effet, le rubis est une évidence pour symboliser la musique de Stravinski et sa personnalité : mystère, scandale, audace,... c'est une atmosphère troublante qui plane au-dessus de cette pièce maîtresse. J'admire Stravinski, le musicien et l'homme ; son courage n'a d'égal que son génie insolent et sa musique, qui pourrait très aisément se faire irritante, s'insinue dans nos esprits, prend possession de nous, jusqu'aux profondeurs de notre être, tel un esprit malin et malicieux. Cette partie, très jazzy, rend hommage à la tradition américaine et porte en elle l'âme de Broadway. La chorégraphie est assurément très différente de celle d'Emeraudes, bien plus ancrée dans le sol, très rythmée... Organique.

rubis

Enfin, Diamants vient clore cet étonnant ballet. D'après les commentaires de la présentatrice qui animé traditionnellement ces retransmissions, il s'agit de la partie que les spectateurs préfèrent, sans doute pour son classicisme éblouissant et rassurant. Il est vrai qu'on se trouve en terrain plus familier, celui de la tradition des grands ballets russes qui ont -rien n'est plus juste- la préciosité et la pureté du diamant. C'est alors, sans surprise, qu'on entend les notes de Tchaïkovski, aussi incontournable et éternel que l'est le diamant. Inébranlable, indomptable, selon son étymologie, ce minéral étincelant représente à merveille la virtuosité mais aussi la rigueur et la grandeur de la Russie Impériale. Diamants s'impose comme le volet le plus féerique, la chorégraphie fondée sur de nombreux pas de deux -et non des scènes d'ensemble comme dans les deux volets précédents- est une somptueuse illustration du romantisme, une partition céleste, voire divine qui nous fait atteindre d'autres cieux.

diamants2

 

Si j'ai une très nette préférence pour Rubis, le ballet dans son ensemble m'a subjuguée par son intelligence. Alors même qu'il est dénué de trame et d'enjeux, il sait se faire intense et vibrant. La cohérence au sein de chaque volet mais aussi dans la conjugaison des trois univers est étonnante. Chaque pierre précieuse évoquée entre en synergie avec la ville qui lui sert d'écrin ainsi qu'avec le rythme et le souffle que lui insuffle chacun des compositeurs ; chorégraphie et univers musical m'ont rarement semblé autant liés. J'ai été très émue par la complicité, la complémentarité évidentes entre les artistes réunis dans cette incroyable aventure.

Les danseurs du Bolchoï (époustouflants, cela va sans dire), costumes, décors, musique, chorégraphie,... tout élément, sans exception, participe à la création d'une unité multiple tels de précieux bijoux qui révèlent leur somptuosité lorsqu'ils parent les lobes délicats, le cou gracile et les fins poignets d'une femme.

J'espère vous avoir donné envie de découvrir à votre tour ce ballet de Balanchine qui a bien plus de valeur et d'éclat que toutes les pierres précieuses du monde réunies.

Bonne journée mes jolis Joyaux :)

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Commentaires
C
J'ai lu ce billet avec un grand intérêt, comme tu peux t'en douter! Tu exprimes à merveille ce qui m'enchante dans ce ballet. Trois styles de danse, trois ambiances, trois compositeurs, pourtant tout se tient... <br /> <br /> <br /> <br /> J'ai un faible pour les émeraudes, mais les rubis et les diamants me ravissent aussi.<br /> <br /> <br /> <br /> À en juger par les photos, cette version du Bolshoï me plairait beaucoup.
M
Tu partages ta passion pour la danse c'est merveilleux ! ça doit être un rêve d'assister à un ballet tel que celui ci ! Tu me fais rêver tout simplement !!!!!!!!!!!!!
M
Bonjour Emma,<br /> <br /> Quel plaisir de découvrir un si beau billet dès le matin. <br /> <br /> C'est superbe !
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