Belle et Sébastien, de Nicolas Vanier, le livre et le film
Bonjour mes Chers :)
Cela ne vous a sans doute pas échappé, de plus en plus de films qui sortent sur grand écran sont des remakes, des suites ou des adaptations de romans (Au bonheur des ogres, Bilbo, La Voleuse de livres, Long week-end, Gone Girl...), séries (Sex and the City, X-Files,...), bandes-dessinées (Quai d'Orsay, La Vie d'Adèle, Lulu femme nue,....) Parfois, ce sont de belles réussites, d'autres fois, les réalisateurs auraient mieux fait de s'abstenir. Il peut-être assez douloureux de voir une oeuvre littéraire que l'on apprécie devenir un film (notre imaginaire en prend souvent un sacré coup, tout comme l'intrigue qui peut subir bien des dommages en devenant un scénario de piètre qualité), on peut se sentir trahi mais il ne faut pas perdre espoir et certaines adaptations cinématographiques viennent judicieusement "compléter", "enrichir" l'oeuvre littéraire en respectant l'univers romanesque, la créativité de l'auteur.
Aussi, lorsque cela m'est possible, j'aime me livrer à une petite étude comparée, ce qui me donne l'occasion de découvrir des romans jamais lus, ou un peu oubliés. Je m'étais prêtée à ce jeu (des sept erreurs ^^) pour L'Attentat, L'Ecume des jours ou encore Les Grands-Mères.
La sortie de Belle et Sébastien, qui fait beaucoup parler d'elle, était trop belle pour ne pas être saisie. En effet, alors que je n'ai jamais vu le feuilleton des années 60 ni lu les romans originaux de Cécile Aubry, l'adaptation en dessin-animé a bercé toute mon enfance. Je n'en loupais pas une miette, fascinée par les paysages montagneux (j'aimais aussi infiniment Dans les Alpes avec Annette !) et émerveillée par la majesté de l'immaculée Belle. Je rêvais, évidemment, d'avoir un gros chien-peluche pour meilleur ami (j'en rêve toujours, d'ailleurs, tout comme de vivre à la montagne).
Notez bien : ce ne sont pas les romans de Cécile Aubry que j'ai lus mais celui écrit par Nicolas Vanier, adapté de son propre scénario qui ne reprend pas l'histoire originale mais a pour contexte la France sous l'Occupation.
Pour un moment de douce nostalgie et d'authenticité, je vous invite à faire un tour chez ma copinaute L'Or, qui nous a offert un très joli billet présentant le feuilleton ainsi que les romans originaux.
Nous sommes en 1943, dans un petit village des Alpes, situé à quelques kilomètres de la frontière Suisse. Sébastien, âgé de huit ans, vit dans ces belles montagnes auprès de son Papé César (bien porté sur la bouteille) -qu'il aide à la bergerie plutôt que d'aller à l'école avec les autres enfants qui le rejettent- et de celle qu'il considère comme sa soeur, Angélina, la jolie boulangère qui fait tourner la tête au médecin, Guillaume. Un certain lieutenant Allemand, à qui elle doit lui fournir trente kilos de pain chaque lundi, ne semble pas non plus insesnible à son charme. Tandis que chacun tente de survivre comme il peut dans ce contexte difficile, une Bête sauvage est soupçonnée d'égorger les moutons. Les villageois, menés par le maire -pas très commode- se mettent en tête de l'éliminer. La suite, vous la connaissez : la Bête n'est autre que Belle, une chienne errante, intelligente et brave, à laquelle Sébastien se lie et pour laquelle il est prêt à prendre tous les risques. C'est un peu Kenny et le dragon avant la lettre, n'est-ce pas ?! Parallèlement à cette belle amitié se développent secrets et mystères entourant les activités de certains habitants ainsi que les origines de Sébastien : César lui cache bien des choses concernant sa mère, un silence pesant que ne supporte plus Angélina.
Angélina et le docteur Guillaume
J'étais impatiente de mon plonger dans ce roman dont la couverture me laissait envisager une histoire enneigée, comme j'ai envie d'en lire en ce moment. Malheureusement pour moi cette épopée alpine se déroule principalement en automne et si les flocons tombent, c'est seulement sur les derniers chapitres qui sont d'ailleurs les plus prenants. En effet, il m'a fallu attendre la quatrième partie, à soixante-dix pages de la fin, pour être intéressée par l'histoire ; avant cela, elle m'a semblé d'un ennui terrible. Le fond est très superficiel, rien n'est approfondi, ni l'intrigue, ni les personnages qui ne sont que des silhouettes, le contexte de la Seconde Guerre mondiale n'apporte rien, sinon qu'il dramatise maladroitement un récit d'une naïveté assez agaçante. L'humanité est ici idéalisée à l'extrême, il n'y a aucune nuances, tandis que manquent cruellement à l'appel les belles et contemplatives descriptions auxquelles on est en droit de s'attendre (elles sont néanmoins compensées par quelques belles photographies du film). Les dialogues sont insipides, quant au style, il est insupportablement fade : uniquement de la parataxe, une narration hachée qui condamne à une lecture difficile par son manque de fluidité. Alors que le roman est très court, les chapitres brefs, j'ai mis un temps démesuré à le lire, obligée bien souvent de relire des pages entières tant le style télégraphique ne parvenait pas à retenir mon attention, captiver mon imagination. En outre, les personnages sont si chichement croqués qu'on ne s'intéresse finalement pas à leurs petites histoires. J'aurais aimé passer du temps dans la boulangerie d'Angélina, à la bergerie auprès de César, en pleine nature à la rencontre d'animaux en tout genre, connaître le mode de vie des montagnards,... Mais rien de tout ça dans ces pages dramatiquement creuses.
C'est une lecture décevante et frustrante qui me donne très envie de découvrir très vite les romans originaux qui sont, j'en suis certaine, bien plus sincères et mieux écrits.
Malgré cette impression très négative, j'avais toujours autant envie de découvrir le film, connaissant les talents de Nicolas Vanier : piètre conteur, ce dernier n'en demeure pas moins un documentariste virtuose doublé d'un explorateur passionné et généreux, ses précédents films nous l'avaient déjà prouvé. Aussi, si je ne me faisais aucune illusion quant au scénario, j'étais certaine de me régaler devant de somptueux paysages. Et je n'ai absolument pas été déçue : dès les premières secondes, mon bidouille était tout serré d'émotions devant la grandeur, la majesté des montagnes. La nature est impressionnante et Vanier la filme avec une très grande humilité, sait la mettre en valeur comme d'autres cinéastes subliment leurs actrices fétiches. Devant sa caméra, Mère Nature est aussi impériale qu'une Penelope Cruz filmée par Almodo, qu'une Anna Karina par Godard. Comme j'ai aimé la voir évoluer au fil des saisons ; chaque scène est un tableau éblouissant, faune et flore sont reines, fleurs de mille couleurs, adorables marmottes, moutons, cours d'eau, glaciers,... Entre la bergerie, le refuge de Sébastien, le village, les petites habitations,... il fait vraiment bon vivre au grand air de Saint-Martin.
Quant à Belle, mes Chers, elle mériterait bien son Oscar de jeune espoir ! Quelle merveilleuse actrice ! Je ne plaisante pas : Vanier n'a vraiment pas son pareil pour mettre en scène les animaux et le travail des dresseurs ainsi que l'intelligence de l'animal, sa sensibilité aussi, sont à saluer absolument. Elle est d'ailleurs bien meilleure que les acteurs, si si ! Je suis rarement sensible au charme des enfants-comédiens mais je dois dire que le jeune Félix Bossuet a gagné la Palme du plus antipathique : avec sa mine renfrognée, ses sourcils froncés en permanence, ses intonations pleines d'arrogance et son élocution façon "p'tit dur en carton", son jeu tout entier manque prodigieusement de naturel. Ahlalala ! Comme Maman a regretté la bouille de l'adorable Mehdi !
Belle et Sébastien comblera sans aucun doute davantage les cynophiles que les cinéphiles. De fait, l'histoire n'est pas particulièrement palpitante et la narration trop elliptique. Plus dynamique que dans le roman, elle n'en est pas moins maladroite car les événements se succèdent et s'enchaînent bien trop rapidement, et la fin se fait abrupte. Néanmoins, les personnages sont bien plus attachants, les dialogues moins creux que dans le roman du film. Ouf !
Le long-métrage s'impose comme un spectacle familial qui fleure bon le terroir, façon Louis la Brocante ou le journal télévisé de Jean-Pierre Père No' ! Avec sa morale rassérénante et ses dernières scènes toutes noëliennes, le beau visage d'Angélina, le coeur tendre des gros durs et l'indétronable Belle, ce film fera le bonheur des amoureux de la nature et des grands espaces, des adeptes des beaux contes de Noël.
Moralité, Nicolas Vanier ne devrait pas publier de livres qui ne soient pas essentiellement d'images ni réaliser de films qui ne soient pas purement documentaires.
Je serais ravie d'avoir votre avis sur cette adaptation (même si vous ne l'avez pas vue), surtout si vous avez connu le feuilleton ou lu les romans de Cécile Aubry. Que pensez-vous de ces changements ? De ce cadre historique dramatique ? Pensez-vous qu'il puisse apporter quelque chose ou qu'adapter fidèlement les oeuvres de Cécile Aubry aurait été plus judicieux et respectueux ?
Dernier détail : n'hésitez pas à rester jusqu'à la fin du générique qui dissimule une utlime scène surprise !
Je vous souhaite un excellent week-end mes Chers, et d'excellentes vacances à celles qui les attendaient avec une vive impatience :)
Des bises !
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